Il n’y a rien qu’on puisse dire ou décrire des trois dernières sonates de Beethoven enfin jouées par Zimerman, groupées, les trois comme une seule et même. Il a pris le temps de les méditer, il s’est mis à leur hauteur morale (la hauteur technique allant de soi), il ne les affronte pas en challenger mais les regarde dans les yeux et les joue comme si la Grande Ombre les lui avait promises, et que lui-même n’ait eu qu’à grandir, lentement, prudemment. Aussi nous les livre-t-il définitives : la forme elle-même, accomplie dans la sonorité; et en même temps la forge, l’acte du titan à l’œuvre. L’évidence subjugue. Et le critère de la réussite au fond va être bien simple : cet air d’accomplissement joyeux sur le pianiste à la fin, mieux qu’un sourire. Plus d’un sera reparti avec le sentiment de n’avoir pas entendu de la musique seulement, et la plus belle, la plus noble du monde; mais d’avoir assisté à quelque chose d’un autre ordre, une rencontre à un autre niveau.
Salle Pleyel, le 6 juin 2014
André Tubeuf
Source: http://blogs.qobuz.com